Le morceau « So What » de l’album Kind of Blue de Miles DAVIS, enregistré en mars et avril 1959, a eu un impact profond et durable sur le jazz, introduisant plusieurs innovations qui ont révolutionné le genre.

Histoire du Morceau

« So What » est une composition de Miles Davis qui fait partie de l’album Kind of Blue, considéré comme l’un des disques de jazz les plus influents de l’histoire.
Le morceau est structuré autour de deux accords principaux (Dm7 et Em7) et utilise le mode dorien (mode mineur).

Éléments Novateurs

Modal Jazz

« So What » est emblématique du passage du jazz vers le modal jazz. Contrairement aux structures d’accords complexes et rapides qui dominaient le jazz jusqu’alors, « So What » se base sur des modes et des gammes plutôt que sur des progressions d’accords. Cette approche a permis une plus grande liberté dans l’improvisation, permettant aux musiciens de se concentrer sur la mélodie et l’expression plutôt que sur la navigation dans des changements d’accords complexes.

Simplicité et Espace

La composition de « So What » est caractérisée par sa simplicité et son usage de l’espace. Le morceau commence avec une ligne de basse distinctive jouée par Paul Chambers, suivie par les interventions de Miles Davis et John Coltrane. L’usage de l’espace dans les solos, particulièrement visible dans le jeu de Miles Davis, a introduit une nouvelle approche de l’improvisation, où la rétention et le silence deviennent des éléments clés de l’expression musicale.

Collaboration et Leadership

Miles Davis a encouragé une approche collaborative dans la composition et l’improvisation. « So What » a été enregistré avec une formation exceptionnelle, incluant Bill Evans (et parfois Wynton Kelly), John Coltrane, Paul Chambers, et Jimmy Cobb. Cette collaboration a permis de créer un son cohésif et innovant, où chaque musicien pouvait apporter sa propre vision et son style unique.

Conséquences sur la musique

Impact sur le Jazz

« So What » et l’album Kind of Blue ont marqué un tournant dans l’histoire du jazz. Le passage au modal jazz a ouvert de nouvelles voies d’expression pour les musiciens, permettant une plus grande liberté et créativité dans l’improvisation. Cette approche a influencé une génération de musiciens de jazz, incluant des légendes comme Herbie Hancock, Chick Corea, et bien d’autres.

Durée des Solos

La structure modale de « So What » a également permis l’extension de la durée des solos. Libérés des contraintes des structures de 32 ou 12 mesures traditionnelles, les solistes pouvaient improviser aussi longtemps que nécessaire pour développer leur idée musicale. Cela a transformé le soliste en véritable compositeur du moment, ce qui a renforcé l’idée que l’improvisation est l’essence même du jazz.

Influence sur d’Autres Genres

L’influence de « So What » et de Kind of Blue s’étend bien au-delà du jazz. Ces compositions ont inspiré des musiciens de rock, de blues, et de musique classique. Par exemple, des morceaux comme « Dark Star » des Grateful Dead, « Whipping Post » des Allman Brothers Band, et « Free Bird » de Lynyrd Skynyrd ont été influencés par les innovations modales introduites par Miles Davis.

Légitimité du Piano en Jazz

Miles Davis a ainsi contribué à élever le statut du piano en jazz.
En collaborant avec des pianistes comme Bill Evans et Herbie Hancock, il a montré que le piano pouvait être un instrument mélodique central dans le jazz, et non juste un instrument d’accompagnement.
Cette approche a enrichi l’expression harmonique et mélodique du jazz.

En résumé, « So What » de Miles Davis a été un catalyseur de changements profonds dans le jazz, introduisant le modal jazz, amplifiant l’importance de l’espace et de la simplicité dans l’improvisation, et influençant non seulement le jazz, mais aussi d’autres genres musicaux. Son héritage continue d’inspirer les musiciens et les compositeurs à ce jour.

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