Les notes cibles : 1- la stratégie pour choisir bonnes notes
Pour faire court, les notes cibles sont les notes que vous choisissez pour marquer les changements d’accords.
C’est aussi simple que ça. Mais on peut faire beaucoup mieux que cette simple définition.
Le contexte
Lorsqu’on improvise, on joue des notes. Des intervalles, des triades, des arpèges, des pentatoniques, des gammes… un large choix pour faire tout et parfois n’importe quoi. Et pour éviter de faire n’importe quoi, il faut savoir ce qu’on fait, et donc savoir choisir les notes qu’on va utiliser. C’est là que les notes cibles entrent en jeu. Voyons comment.
La grille harmonique
Quand on improvise, on joue sur une grille généralement. Cette grille, c’est le cadre harmonique que les musiciens vont suivre. Pour que l’improvisation sonne, elle doit être en cohérence avec cette grille : c’est comme ça qu’on donne du sens à l’improvisation.
Les changements d’accords
Lorsque la grille évolue, les accords s’enchaînent, se suivent, et l’improvisation doit suivre, suivant l’intention de l’improvisateur, une certaine logique.
Pour cela, l’improvisation va devoir suivre l’harmonie, et donc, le choix des notes va évoluer et changer sur chaque accord.
Exemple simple
Prenons la grille :
C’est simple : 3 accords, tous majeurs. En analysant, la gamme générale est celle G majeur. Ça fixe un cadre. Mais attention, sur chaque accord, il existe des notes qui vont coller et d’autres qui vont accrocher l’oreille. Et pour couronner le tout, quand on change d’accord, les notes qui accrochent vont changer également (voir la page sur les notes caractéristiques).
Sur le G, si vous jouez et insistez sur la note C, ça ne passera pas, même si C est dans la gamme de G. Le problème, c’est que sur un accord majeur, la quarte est la note à éviter, et vous l’avez deviné, C est la quarte de G, et donc la note caractéristique, et à éviter (ne pas jouer sur les temps forts).
Donc, comme il y a des notes à éviter, voyons celles qu’il faut éviter sur chacun de nos 3 accords :
- sur le G : la quarte C
- pour l’accord de D : la note G (la fondamentale de la gamme !!!)
- et sur le C : c’est la note F, qui n’est pas dans la gamme de G (on a un F# en G qui passe bien sur un C)
Principe des notes cibles
Pour que l’improvisation ait un sens, une intention, il faut, au changement d’accord, choisir une note de cet accord, et si possible, une note qui n’était pas dans l’accord précédent. C’est de cette façon que l’effet sera le plus saisissant.
Reprenons les 3 accords du paragraphe précédent. Le passage de l’accord G à celui de D, nous avons :
- pour G : G, B et D
- pour D : D, F# A
La note D est commune. Elle peut être choisie comme note d’arrivée, mais ne provoquera pas cette sensation d’une impro qui suit la grille.
En revanche, en arrivant sur l’accord de D, si vous choisissez d’arriver sur la note F#, alors vous marquez bien l’évolution de G à D. Si en plus vous jouez un G qui est suivi d’un F# en arrivant sur cet accord de D, alors cette sensation sera plus forte encore.
Voilà le principe général des notes cibles ou encore « target notes ».
De G à D : la note cible est F#, approchée par la note G
De D à C : la note cible est G, approchée par F#
D C à G : la note cible est B, approchée par C
De cette manière, le changement d’accord est bien marqué dans l’improvisation.
Mise en place de cette stratégie
Comme nous l’avons dit plus haut, il faut réfléchir à ce que vous allez jouer avant de se lancer. Ici, il n’est pas question d’anticiper toutes les notes de votre improvisation, bien évidemment. On ne parlerait alors plus d’improvisation, mais de préparer les changements d’accords, pour bien, suivre la grille et donner ce sentiment d’unité entre rythmique et solo.
Penser triades/arpèges
Pour être sûr de jouer une note de l’accord de destination, il faut jouer les notes qui le composent, à savoir sa triade si l’accord est simple, ou son arpège s’il comporte 4 notes ou plus.
Le jeu en triades/arpèges est puissant car il vous permet de souligner les accords, de leur apporter de la couleur, voire de la tension, le tout selon vos goûts, vos souhaits.
Voici un exemple simple :
Je ne le répéterai jamais assez, l’excellent morceau « Sultans of Swing», de Dire Straits, est un chef-d’œuvre en la matière. Jeu avec les triades pour sonner « in », ou « out » sur les accords de dominante.
Une série d’articles sur ce site en fait l’étude, couplet par couplet, ainsi que les 2 solos, pour bien voir comment Mark Knoplfer a construit toutes ses phrases, ses solos, et ce qui fait que tout sonne à merveille.
Avec les pentatoniques
De la même manière qu’avec les triades et les arpèges, il est possible, et même recommandé, d’utiliser les notes cibles avec les pentatoniques.
Rappelons que la gamme pentatonique est la gamme majeure à laquelle on a retiré les 2 notes qui peuvent poser problème : la quarte et la septième.
Ces 2 notes sont souvent celles qui permettent de jouer avec les notes cibles. Il faudra donc, pour utiliser cette technique, changer de gamme pentatonique lors du changement d’accord.
Pentatonique exemple 1
Restons simples et utilisons la grille de « knocking on heaven’s door » :
Jouons les pentatoniques de chaque accord :
- sur G : pentatonique de G majeur
- sur D : pentatonique de D majeur
- sur A- : pentatonique de A- (c’est celle de C majeur)
- sur C : pentatonique de C majeur
Qu’est-ce que cela implique ?
Voyons les notes de chacune de ces pentatoniques :
- G : G A B D E
- D : D E F# A B
- C/A- : C D E G A
Pour passer du G au D, on a bien la note G qui devient F# en passant de la penta de G à celle de D : la note cible peut être utilisée.
Du D au C ou au A-, nous avons la même chose mais dans l’autre sens : de F# en D vers G en C/A-. Il y a aussi la possibilité de passer du B à C pour jouer avec ces notes se déplaçant d’un demi-ton.
Conclusion
Les notes cibles sont une technique extrêmement efficace pour jouer juste et avoir une improvisation qui suit bien les mouvements d’accords. Il serait vraiment dommage de ne pas les utiliser.
Pour aller plus loin
Pour ajouter de la couleur aux accords, tout en restant juste, ou pas si vous le souhaitez, regarder du côté des familles d’accords. Les familles vous permettent, pour chaque accord, en jouant avec les accords de la même famille, d’apporter des couleurs, plus ou moins fortes, et même de la tension, pour forcer l’accord à résoudre ou accompagner cette résolution.
On appelle aussi cela la surimposition d’accords.
No Comment